
Dans le sillage des senteurs de terre et de forêt, Gilbert Hugou marche depuis toujours, cœur ouvert et panier plein, comme on offre un poème. Né à Rougiers, enraciné dans sa Provence natale, ce « Seigneur de la Rabasse » parcourt les marchés de Provence, de France, d’Espagne ou d’Italie avec l’âme généreuse d’un homme en quête de liens authentiques autant que de truffes. Depuis 2010, il est épaulé par sa fille Caroline qui a repris progressivement la direction de la maison familiale, mêlant fidélité aux clients et vision personnelle.


Complices depuis 30 ou 40 ans, ils partagent bien plus qu’un repas… Un art de vivre, un hommage vibrant à la terre et à ceux qui la font parler.
ANECDOTES
Il y a dans le regard de Gilbert Hugou une lumière tranquille, celle des hommes qui n’ont jamais couru après la gloire mais que la passion a porté loin. Il grandit entre les chênes et les silences, là où les truffes se devinent plus qu’elles ne se cherchent. Il cueille dès l’enfance avec ses frères, « pour le plaisir », dans les truffières sauvages qu’il connaît par cœur. À l’époque, c’est « le plat du pauvre », et pourtant déjà, il y met le cœur. Son père vendait truites, écrevisses, œufs, offrant pour les fêtes une truffe à ses meilleurs clients. C’est ainsi que tout commence. Pas de porte à porte, jamais : ce sont les chefs qui viennent à eux. Et ils font partie des premiers à monter sur Paris, « le bout du monde » à l’époque. Autant de mains serrées, de regards francs, de respect partagé. Ce qui le bouleverse encore, ce sont ces rencontres. Les liens. La fidélité. Comme avec Pierre Gagnaire, sa première grande émotion. Il se souvient aussi de cette truffe géante, presque un kilo, trouvée un matin comme un miracle ou encore de ces 8 kg dénichés en deux week-ends sous les mêmes arbres. Il parle des orages de juillet, des mouches dorées qui dansent au soleil et trahissent la présence d’une truffe. Pour lui, elle est un miracle de la nature, une culture imprévisible que la main de l’homme peine à apprivoiser. Et pourtant on y revient toujours… Ce précieux diamant noir dont la puissance de l’effluve enivre, restant immuable quel qu’en soit la taille.
FOLKLORE & VÉRITÉS
Le monde de la truffe est un théâtre, peuplé de mythes anciens, de vérités instables et de croyances lunaires. Gilbert Hugou s’y promène en conteur averti. Il parle des truffes comme on parle des astres : noires, blanches, d’été ou d’hiver, chacune a sa saison, son mystère. Aphrodisiaque ? Il ne saurait le dire, toutefois une chose est sûre sa culture est un pari capricieux. « On peut planter, attendre… mais la nature décide toujours. » On évoque le cochon truffier, aujourd’hui remplacé par le chien, plus docile mais moins instinctif. Pour ce qui est des ronds de sorcière… Des cercles nus autour des arbres, signes presque magiques, mais parfois trompeurs. Même la reproduction obéit à des lois insaisissables : mâle ou femelle selon l’environnement, la truffe choisit son rôle pour survivre. Elle pousse là où on ne l’attend pas, sous les vignes, les oliviers, au bord des routes. Elle ne cesse de fasciner. Sa rareté, sa liberté, son refus d’être domptée. Elle est l’élue de la lune, qui lorsqu’elle est pleine, est annonciatrice de bonne récolte.

SECRETS DE CHEFS
À table, ils murmurent leurs secrets. Philippe Duault, Éric Canino, Philippe Guérin… Tous magnifient la mélanosporum. Fraîche, sans fioriture, elle remporte tous les suffrages. Jadis livrée en terre, comme pour Pierre Gagnaire qui l’aimait brute. Aujourd’hui, Gilbert la nettoie, mais l’esprit reste : la truffe ne triche pas. Une simple tartine, fleur de sel, quelques lamelles fraîches suffisent. Sur viande, poisson, Saint-Jacques… elle élève tout. Éric Canino, lui à la main généreuse et en parsème toujours plus. Pour eux, la truffe, c’est l’évidence.
Gilbert Hugou ne cherche pas la truffe, il l’écoute… Car ce diamant noir ne se trouve pas, il se révèle.

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